mercredi 25 avril 2012

La goutte de trop (collection laïcité) ILLUSTRÉ PAR .AN

à la surface, il y a un peu de soleil qui traîne, il perce péniblement les eaux troubles du lac.
Les poissons s’ennuient. 
Immobiles, ils regardent flotter la lumière, il n’y a que ça à faire.
Ils ne veulent pas se parler, ils crachent des bulles qu’ils regardent monter.
Ce sont leurs petites prières.
Ils passent leur vie à rêver les yeux ouverts de ce qui arrivera après, quand le corps flotte et rejoint l’air frais.
« Ah après ce s’ra bien ! » qu'ils disent tous.
Après ce sera bien pour tout le monde, mais pour chacun différemment.
La truite sait qu’elle aura des ailes en dentelle, le mérou veux devenir une bouteille en plastique, la carpe restera carpe, mais des jambes pousseront à la place des branchies et elle aura une belle voix. L’anguille sera une crêpe gluante, elle se hissera à la cime des arbres. Le saumon deviendra une pierre, insensible à la force du courant, les pieds dans l’eau et la tête en l’air.
Un automne,  Gérard, un poisson loup, tombe dans le lac avec l’eau de pluie.
Il éclate la poussière en suspension, et l eau devient plus belle.

Tous se pressent à sa rencontre, ils le prennent pour le messie, 
mais Gérard dit qu’il ne croit à rien de tout ça.
« Quand on meurt on ne vit plus. » Qu’il dit.
« On pourrit, et le poisson qui nous mange vomit. »

Tous les espoirs des prêcheurs d'eau douce s'évaporent et ils en ont du dégout plein la bouche, ils crachent des bulles pour étouffer les paroles de Gérald.
Mais que voulez-vous, il balaie tout d’un coup de nageoire, sa voix les inonde et ils y en a qui paniquent, d’autres tombent dans les pommes.
Ils l’auraient bien envoyé au bûcher, s'il y avait eu moins de flotte.

Ils y en à d'autres qui jouent avec Gérard, entre les algues et les courants, il y a des messie qui vous apprennent à être vivant.






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